Nouvelle technique de détection et de surveillance du givre destinée aux avions et aux éoliennes

08 décembre 2021
Bram Cloet
Ozlem Ceyhan Yilmaz

Avec le retour des grands froids, un nombre appréciable d’équipements, au nombre desquels les avions et les éoliennes, sont aux prises avec les répercussions des basses températures, des précipitations hivernales et du gel. Nous avons récemment souligné que les variations de température et le givrage comptent des dix causes majeures des défaillances qui affectent les éoliennes. Divers développements récents devraient changer la donne en permettant à plusieurs secteurs d’activité de réaliser des économies et de s’épargner bien des efforts. 

La formation de givre sur les pales d’une éoliennes ou sur les ailes et les hélices d’un avion ou d’un drone occasionne une baisse de rendement, une diminution de la portance, voire l’apparition d’un balourd assorti de vibrations. La lutte contre la formation de givre est à la fois active et passive. S’agissant des éoliennes, la manifestation de conditions météorologiques propices à la formation de givre entraîne au mieux un arrêt de la turbine et au pire l’installation, sur la nacelle, d’instruments de détection (incapables au demeurant de restituer une image globale des pales), en passant par une inspection manuelle sur site. En Belgique, en raison des réglementations en matière de sécurité, une éolienne ne peut être remise en marche qu’après confirmation par un examen visuel de la disparition totale du givre présent sur les pales. Les pertes de production et les examens visuels consécutifs à l’arrêt de toute éolienne coûtent cher. Par conséquent, le potentiel de toute méthode de détection économique et fiable est considérable dans ce domaine.

La prévention de ces coûts passe par l’installation de capteurs à même de déceler aussi bien la présence que l’absence de givre, en toute fiabilité. Cette détection peut s’appuyer sur divers principes de mesure. Le défi à relever réside dans leur évaluation efficace et dans leur application aux éoliennes.

Détection par micro-ondes de la présence de givre

Une innovation provenant du Canada constitue un excellent exemple de capteur de cette nature : des chercheurs auprès de l’Université de la Colombie-Britannique Okanagan ont développé un détecteur à micro-ondes qui avertit les pilotes d’avions, d’hélicoptères ou les opérateurs éoliens au moment précis où l’eau devient cristalline et où, par conséquent, la glace commence à se former. Les chercheurs ont créé des structures caractérisées par la production d’un champ électrique et d’un champ magnétique de haute densité autour d’elles. Ces champs permettent de déceler toute évolution des propriétés du matériau étudié. Dans un premier temps, les chercheurs ont testé la permittivité d’une substance à l’aide de ces capteurs, autrement dit la facilité avec laquelle les molécules se meuvent à proximité d’un champ électrique. La permittivité de l’eau s’élève à 80, mais lorsqu’elle gèle cette valeur est ramenée à 3,2. Une différence considérable facile à détecter à l’aide de ces champs électriques.

Dans des régions aussi froides que le Canada, des agents de lutte contre le givrage sont pulvérisés sur les avions avant leur décollage. Limité dans le temps, l’effet de ces agents en impose l’application répétée. Au lieu de procéder à leur pulvérisation à intervalles réguliers, on peut faire appel à l’exécution de mesures par des capteurs. Ces capteurs seront vraisemblablement mis à contribution pour réduire les coûts et l’impact environnemental associés aux méthodes de dégivrage.

Outre ces secteurs que sont l’aviation et l’énergie éolienne, ces capteurs s’emploient dans tous les domaines où l’on assiste à la formation de givre ou de verglas : trottoirs, installations frigorifiques, surveillance météorologique, etc.

Détection acoustique de la formation de givre

Relativement méconnue, mais très prometteuse, une autre technique de détection du givre repose sur l’utilisation de signaux acoustiques engendrés lors de la congélation ou de la liquéfaction de la glace. Dans le cadre du projet européen NDTonAIR, cette méthode a été récemment mise à contribution lors de la recherche, par la KULeuven et Brussels Airlines, d’un dispositif de détection de la présence de givre dans les réservoirs de carburant (Ice in the Fuel Tank). Les émissions acoustiques dans le spectre ultrasonique permettent de procéder à l’enregistrement d’une palette d’événements qui se produisent lors des processus de relaxation de la tension que l’on observe pendant la transformation de l’eau en glace.

Cette technique présente le grand avantage d’autoriser l’enregistrement de la formation de glace sans contact direct avec l’eau gelée, étant donné qu’il s’agit de la détection exclusive de signaux acoustiques, lesquels franchissent des distances appréciables. Pour accroître le potentiel de ce développement et le tester dans des conditions plus réalistes, les chercheurs ont lancé, dans le cadre du projet COOCK intitulé « Fighting Icing », une campagne d’essais sur le dispositif de formation de glace installé dans la chambre climatique d’Anvers. En outre, le modèle d’un panneau du fuselage d’un avion a été soumis aux conditions dans lesquelles on assiste à la formation de glace. Les chercheurs ont démontré le potentiel de cette méthode dans de telles circonstances. Dès lors, le consortium s’est mis en quête d’autres domaines d’application.

Détection de pointe de la présence de glace

Dans le cadre du Projet COOCK intitulé Fighting icing, Sirris propose un rapport avancé portant sur les techniques de détection de la présence de glace dont la commercialisation a déjà commencé. Il s’agit de capteurs dont le fonctionnement repose sur trois principes.

  • Principe électrique : mesure de l’évolution de l’impédance et de la capacité à la surface du capteur.
  • Principe optique : mesure d’un signal optique influencé par la formation de glace entre la source et la réception du signal optique.
  • Principe mécanique : mesure de l’évolution des vibrations affectant une sonde sur laquelle se forme une couche de glace.


Pour en savoir plus sur ces recherches, consultez nos rapports à télécharger. Un capteur de chacun de ces trois principes seront testés et évalués au sein de la grande chambre climatique de Sirris à l’aide du dispositif de formation de glace réalisé grâce au Projet NewSkin.

Sources

  • Daniele Brandolisio, Overview of the state of the art methods and techniques for ice detection, Coock Fighting Icing Project Deliverable D2.1.1, Sirris, décembre 2020
  • https://www.asme.org
  • Stamm, H. Pfeiffer, J. Reynaert, M. Wevers, Using Acoustic Emission Measurements for Ice-Melting Detection, Applied Sciences, 9 (2019) 5387.

Ce blog a été rédigé dans le cadre du projet COOCK intitulé Fighting Icing, qui est financé par VLAIO (projet n°: HBC.2019.2495), et du projet européen intitulé NewSkin, lequel est financé par le programme de recherche et d’innovation Horizon 2020 (N° 862100). Le contenu de ce blog rend exclusivement compte de la vision du ou des auteurs et la Commission européenne décline toute responsabilité quant à toute utilisation éventuelle des informations qu’il recèle.

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