L’industrie éolienne aujourd'hui et demain

24 juillet 2018
Pieter Jan Jordaens

Plus tôt cette année, WindEurope - la voix de l'industrie éolienne européenne - a interviewé Pieter Jan Jordaens de l'OWI Lab. Voici les temps forts de cette interview.

OWI-Lab est actif dans la R&D et l’innovation, un domaine qui offre un grand potentiel, mais où les risques sont eux aussi considérables. Il peut ainsi arriver que l'innovation n’ait pas le succès escompté ou qu’elle arrive trop tôt pour le marché. C’est ce qui est arrivé aux entreprises belges actives dans le développement et la production d'éoliennes dans les années 1980 et 1990. Cette innovation importante est arrivée trop tôt pour notre pays, qui n'était pas prêt à l'époque. Néanmoins, ces entreprises ont démarré quelque chose qui allait s’avérer important à long terme. Par exemple, ces entreprises avaient besoin de composants. Elles ont donc entraîné la naissance de nouvelles entreprises, comme l’ancienne Hansen Transmissions (désormais ZF Wind Power) et Pauwels Transfo (désormais CG Power Systems). À l’époque, les éoliennes étaient plus une niche qu'une perspective prometteuse par rapport aux boîtes d’engrenage industrielles, mais au fil des années, des connaissances se sont accumulées et ont fait de ZF Wind Power le leader mondial dans la conception et la production de boîtes d’engrenage pour éoliennes.

DEME-GoSea, Jan De Nul, Smulders, etc. ont connu un parcours similaire. Ces entreprises ont été impliquées dans la construction des premiers parcs éoliens offshore dans les eaux belges. Elles aussi travaillent maintenant dans le monde entier en Europe, mais aussi ailleurs, par exemple à Taïwan. L’OWI Lab entend soutenir les entreprises tout au long de la chaîne de valeur, afin qu'elles puissent devenir des leaders mondiaux dans le domaine de l'énergie éolienne. Ce qu'il faut, c'est le risque le plus faible possible, afin que la R&D et l'innovation soient rentables. Avec un marché intérieur et des subventions, le risque est plus faible. 

Évolution du secteur

 

 

À l'avenir, la localisation et la manière d'innover vont connaître un décalage. Par exemple, le potentiel de la numérisation est énorme, mais pour prouver sa valeur, il faut des investissements, des fonds et du temps pour tirer des enseignements des ensembles de données. Un thème comme le structural health monitoring, par exemple, n'existait pas vraiment en 2010. Aujourd'hui, sa valeur a été reconnue par les concepteurs et les opérateurs à travers l'Europe. L’OWI-Lab a été l'un des premiers à être actif dans ce domaine.

Pour ce faire, l'OWI-Lab a mis en œuvre les connaissances et l'expérience acquises par le professeur Christof Devriendt (VUB) dans le domaine du structural health monitoring dans le secteur aérospatial pour tester, surveiller et analyser le comportement structurel de certaines fondations d'éoliennes offshore dans les parcs éoliens belges pendant une année complète. Toutes les variables possibles ont été prises en compte. La mise en place de telles campagnes de surveillance à long terme (avec le soutien du VLAIO) a permis d'obtenir et d'analyser des ensembles de données. Cela a clairement démontré la valeur ajoutée de ces données en combinaison avec une connaissance approfondie des applications. Certains enseignements ont même été récompensés par le best poster award lors de la dernière WindEurope Offshore Wind Conference à Londres. La connaissance de certains paramètres d’in-field data peut s'avérer très précieuse pour le développement des connaissances, de façon à réduire davantage le LCOE des parcs éoliens offshore. Un bon exemple de valorisation grâce à ce projet de R&D est l’établissement de la spin-off 24SEA. 

Synergie 

 

L'intégration des connaissances d'autres secteurs pour développer l'énergie éolienne est une méthode très pratique, car d'autres secteurs font face à des défis similaires. Pour cette raison, des clusters sont en cours de création en Flandre. Des experts de différents domaines peuvent y travailler ensemble sur un sujet spécifique ou dans le cadre de projets de R&D spécifiques. Par exemple, l'OWI-Lab dirige actuellement et pour trois ans un cluster consacré à l’innovation dans le domaine de l'énergie offshore en collaboration avec l’UGent et la VUB. Ce cluster coopère avec d'autres clusters, par exemple ceux consacrés aux drones et aux composites. Bien que ces clusters soient actifs dans différents secteurs industriels, ils sont en effet souvent confrontés à des défis similaires. Les drones doivent être capables d'effectuer des contrôles sur les ponts, les bâtiments, etc., mais une technologie similaire peut être utilisée pour inspecter les pales d’éoliennes, par exemple. 

Il existe également des synergies pour les composites. Dans le projet CompositeLoop, le cluster collabore avec le cluster sur les matériaux composites. Le projet vise à étudier la mise au rebut et le traitement en fin de vie des structures composites à grande échelle. Dans le cas du secteur éolien, il s'agit de grandes tôles composites, mais le cluster composite comprend aussi d'autres cas intéressants, comme la durée de vie finale de silos composites ou de structures de l'industrie aérospatiale.

En outre, il existe aussi des synergies avec d'autres secteurs désireux de réduire leur empreinte carbone, comme le secteur minier, qui explore des technologies pour réduire à la fois son empreinte et ses coûts (énergétiques). 

Perspectives

 

Pour l'avenir, OWI-Lab veut parvenir à une fiabilité toujours plus élevée des éoliennes. L'objectif final est d'éliminer les mises à l'arrêt imprévues des machines. Cela réduirait considérablement les coûts d’O&M et permettrait de produire plus d'énergie. L'intégration du stockage est un autre aspect qui, espérons-le, pourra être réalisé à l'avenir. La fiabilité et la disponibilité sont actuellement à la hausse. Il faut à présent y ajouter des solutions pour les éoliennes ou les parcs éoliens, afin de pouvoir fournir un flux d'énergie continu avec une qualité de réseau adéquate. L'internationalisation du secteur serait elle aussi positive, afin d'encourager les pays qui dépendent encore des combustibles fossiles à investir dans l'énergie éolienne.

Pour que l'Europe reste compétitive, le marché intérieur ne doit pas disparaître. Il s’agit en effet de notre territoire d'essai, l'endroit où s'accumulent les connaissances sur l'énergie éolienne sur terre et en mer, permettant à diverses entreprises de développer de nouveaux produits et services qui seront également exportés dans le contexte international. Il est donc positif d’apprendre que l'UE a récemment décidé de porter les objectifs en matière d'énergies renouvelables à 32 % d'ici 2030. L'énergie éolienne terrestre, et spécifiquement offshore, jouera un rôle important à cet égard.  

Les entreprises de production locales ne peuvent pas non plus disparaître. Il est bien connu que l'Europe est plus chère, par exemple en raison des coûts élevés de la main-d'œuvre, mais il existe également d'autres options pour attirer et retenir les entreprises manufacturières.

Pour que la R&D et sa valorisation soient possibles, une infrastructure est requise et les connaissances doivent être développées davantage. Cela nécessite à la fois du personnel et des ressources. Avec la coopération de l'OWI Lab, nous voulons travailler avec l'industrie et les instituts de connaissances pour que notre secteur local de l'énergie éolienne ait le vent en poupe.

Vous pourrez lire l’interview complète ici. 

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